Ironman Mont-Tremblant

jusqu’au bout pour sa femme

Lorsqu’il plongera dans l’eau froide du lac Tremblant peu après le lever du soleil ce matin, Nicolas Bertrand n’aura qu’un seul objectif : terminer l’épreuve en l’honneur de sa femme, atteinte d’un cancer du cerveau incurable.

Ironman de Mont-Tremblant

« Si j’ai envie de lâcher, je vais penser à Laurie »

Après 3,8 km de natation et 180 km sur un vélo, il y aura forcément des instants où le corps et l’esprit de Nicolas Bertrand tenteront de dire stop au cours de l’épreuve de course à pied de l’Ironman de Mont-Tremblant.

Mais chaque athlète a son bouclier pour résister à la tentation de l’abandon : un mantra répété en boucle, une pensée envers un être cher ou un moment déterminant de son existence. L’homme de 28 ans sait pourquoi il s’est embarqué dans une telle aventure et de quelle manière il luttera pour aller au bout aujourd’hui. Il y a le défi personnel en filigrane, mais surtout l’envie de faire avancer une cause, celle de la recherche contre le cancer du cerveau. Depuis cinq ans, sa conjointe, Laurie, est atteinte d’un cancer du cerveau, un glioblastome de grade IV, incurable.

« Je ne vais pas juste penser à elle dans cet Ironman, qui est avant tout une épreuve mentale, raconte-t-il. Après des annonces sur les réseaux sociaux, j’ai eu la chance d’avoir de beaux témoignages et ça m’a vraiment donné de la force. Par exemple, une dame, qui avait couru un marathon après la mort de son jeune garçon, m’a expliqué son cheminement. Le père de l’un de mes meilleurs amis est aussi décédé d’un cancer du cerveau. Si j’ai envie de lâcher, je vais penser à Laurie, mais aussi à toutes ces personnes-là. Je veux juste que la recherche avance. »

Marié depuis près de deux ans, le couple a dû traverser de nombreuses épreuves depuis le diagnostic d’octobre 2013. Il y a eu l’opération au cours de laquelle les médecins ont enlevé une tumeur de la taille d’une lime, de longs mois de chimiothérapie, puis un traitement expérimental sous la forme d’un casque émettant des impulsions électriques séquentielles. 

« Cela empêche les cellules de se regrouper pour reformer une tumeur. C’est comme une mini dose de chimio qu’elle supporte très bien, souligne l’étudiant au baccalauréat en enseignement de l’éducation physique. »

« Les médecins lui donnaient 16 mois à vivre en 2013 et elle est toujours là en 2018. Mais ce n’est pas toujours facile parce qu’elle a toujours ce casque sur elle et que ça chauffe la tête. »

— Nicolas Bertrand

Tous les trois jours, c’est lui qui réinstalle le casque de sa conjointe. Il doit également reprendre cette étape lorsque les électrodes se décollent après un effort physique.

Voilà pour ces gestes qui sont devenus routiniers. Mais, au-delà de ce soutien quotidien, il souhaitait faire davantage en se lançant un défi à la hauteur du combat mené par Laurie et par tant d’autres personnes. Lorsqu’il terminait des demi-marathons, plus jeune, il lui paraissait incroyable de doubler la distance pour boucler un marathon. Et que dire, alors, d’un Ironman qui teste les limites de tous ceux qui osent se jeter à l’eau ?

« C’est une discipline qui sort de l’ordinaire, reconnaît-il. Je me suis toujours dit que je devais l’essayer un jour, pas forcément par plaisir, mais en soutien d’une cause. C’est là que sont arrivées les péripéties de ma femme, et ça a totalement changé ma personnalité. »

« Est-ce qu’un demi-Ironman aurait été assez ? Je pense que oui, mais un Ironman complet me donne plus de crédibilité dans cette cause, précise-t-il. En l’apprenant, je voulais que mes interlocuteurs me répondent que c’est démesuré. Et moi, je réplique que ce n’est rien par rapport à quelqu’un qui se bat chaque jour et qui ne sait pas si elle va se réveiller demain. »

Un fonds et du soutien

Sur sa page Facebook « Nicolas et Laurie pour le Neuro », l’étudiant publie régulièrement des nouvelles d’un fonds créé auprès des Institut et hôpital neurologiques de Montréal (INM), liés à l’Université McGill.

Il dit fonder de grands espoirs sur les vaccins immunothérapeutiques qui aident à renforcer ou à rétablir la capacité du système immunitaire à combattre le cancer. Sur cette même page, il donne également de nombreux détails sur sa préparation. Au fil des publications, son histoire a touché bien des intervenants du milieu du triathlon. 

« Préparer un Ironman, c’est du temps, de l’investissement et des compromis, énumère-t-il. Kim Boyd et Steve Horth, de Bionick Triathlon, ont vu mon histoire, m’ont contacté et m’ont permis d’avoir des entraînements très spécialisés sans que cela me coûte quoi que ce soit. Au début, c’est intimidant d’arriver dans un club de triathlon et de se lancer dans la préparation d’un Ironman. Ils ont su me rassurer tout de suite. De toute façon, je leur ai dit que je n’étais pas là pour performer, mais pour le terminer. »

Et il le répète, il ne sera mentalement pas seul, aujourd’hui, dans les eaux du lac Tremblant et sur les routes laurentiennes. Chaque battement de jambes, chaque coup de pédale et chaque foulée s’inscriront dans un dessein bien plus grand que de simplement finir un premier Ironman.

Ironman Mont-Tremblant

Maman, future médecin... et triathlète professionnelle

Valérie Bélanger sera l’une des 19 professionnelles à participer à l’Ironman de Mont-Tremblant aujourd’hui. Jeune maman d’un garçon de deux ans et demi et future médecin, l’athlète de 28 ans espère bien voir le fil d’arrivée d’un Ironman 140.6 (140,6 milles, soit 226 km) pour la première fois. « Je n’ai jamais été aussi prête pour une course que maintenant. Je ne me suis jamais autant entraînée que lors des dernières semaines. Si toutes les étoiles s’alignent, ça devrait bien aller pour moi », assure-t-elle.

Comment se prépare-t-on quand on est une jeune maman ?

Quand mon garçon était dans les premiers mois de sa vie, c’était vraiment exigeant. Les nuits étaient difficiles parce qu’il se réveillait plusieurs fois et on ne peut pas vraiment récupérer. En plus, comme j’allaitais, il fallait que je sois avec lui en tout temps. Il est plus grand, mais tous les enfants ont besoin d’attention. Je ne peux donc pas dire que je mets plus de temps [à l’entraînement] depuis qu’il a vieilli et que je n’allaite plus. C’est différent maintenant.

Vous allez recevoir votre diplôme de médecin au mois d’octobre. Avez-vous pensé à la manière de concilier le travail, la famille et les triathlons ?

Il y a de bonnes chances que cela continue parce que l’entraînement est ancré en moi. Je m’entraîne presque chaque jour depuis 2004. […] Ce n’est pas parce que j’ai un enfant que je vais arrêter. Par contre, c’est vraiment difficile pour une famille quand on fait de la course de haut niveau. Ce n’est pas optimal parce que ça nous fait voyager. Des fois, les enfants ne peuvent pas suivre ou le conjoint ne peut pas venir. Ça nous oblige aussi à nous entraîner un certain nombre d’heures au détriment de la famille. Pour moi, la question est plutôt de savoir si je vais continuer à faire des triathlons en tant que professionnelle. Ce sera à discuter, mais j’ai la chance d’avoir une facilité dans les sports d’endurance.

Avec l’entraînement des dernières semaines, quels sont les objectifs pour l’Ironman d’aujourd’hui ?

J’espère que ce sera la bonne et que je vais aller au bout, cette fois. L’an dernier, j’avais commencé l’Ironman de Mont-Tremblant en arrêtant volontairement après un demi-marathon. Je n’étais pas entraînée et je ne voulais surtout pas me blesser. J’ai essayé l’Ironman de Lake Placid [le mois dernier], mais j’ai eu trop froid durant la natation. J’ai essayé de beaucoup manger sur le vélo, mais je n’y arrivais pas. Ensuite, j’ai eu des problèmes intestinaux. En arrivant à la tente médicale, j’étais en hypothermie.

Apparemment, vous travaillez beaucoup sur la natation, qui est un point faible.

Peu importe ce que l’on fait dans la vie, il faut de la pratique pour être bon. La natation est le sport que j’ai le moins pratiqué des trois. Ces derniers temps, j’ai pu nager toutes les semaines, ce que je n’avais jamais pu faire auparavant. J’imagine que je vais m’améliorer.

Le parcours de Mont-Tremblant a-t-il un cachet particulier, pour vous, en comparaison des autres Ironman ?

Il a une grande valeur sentimentale, car j’y vais depuis que la course existe. Les trois premières années, j’étais au sein de l’équipe médicale comme bénévole pendant que mon conjoint faisait les triathlons. Puis j’ai commencé le triathlon avec un demi-Ironman en 2015. Ce qui est magique, c’est la beauté du parcours, notamment à vélo. L’asphalte est beau, le parcours est varié avec du plat et des côtes. Je suis une fille de nature, et là, on est toujours dans la nature.

Ironman Mont-Tremblant

Les derniers préparatifs en images

Les vélos sont rangés dans la zone de transition, les vêtements de course sont placés dans leurs sacs de transport, les dernières formalités ont été réglées… Retour sur la dernière journée de préparation avant l’épreuve.

— La Presse

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